Varanasi, la ville de la mort...

22.01.2013
La nuit fut très bruyante. Des gens ont entamés un concert au milieu de la nuit, puis un second, s'ensuit les carillons des temples et les chants des mosquées. Un chien hurle tellement à la mort, ses cordes vocales expriment toute sa douleur, que Laure hésite à se lever pour aller l'achever au couteau suisse...
Vu la sympathie de notre proprio, la lenteur du wifi, et la douche froide, on décide de chercher un autre logement. Mais c'est un peu trop tôt. Nous trouvons une boulangerie, dont les propriétaires allemands ont ramenés avec eux de bonnes recettes de brioches sucrées au chocolat ou à la cannelle. C'est bien bon, accompagné d'un thé sucré au lait, ça glisse comme sur des roulettes.
L'indien qui nous sert est bien fier de nous montrer son auberge à 2 pas de là. La seule chambre disponible avec une chouette vue sur le Gange avec balcon au dernier étage est un peu chère. Nous continuons la recherche pendant une heure et croisons la mort qui frappe de tous cotés dans ces ruelles sordides où le monde émerge: une petite souris, un gros rat, un chien et un chiot qui tient dans la main...
A force de tourner et retourner le mec de la guesthouse qui nous plaît nous fait le tarif qui nous convient aussi. Nous y amenons nos sacs et allons nous balader au bord du Gange.
 
Âmes sensibles s'abstenir du prochain paragraphe...
 
Nous arrivons jusqu'au Ghat Dasashwamedh où se déroulent les crémations 24h sur 24 à la chaîne. Le lieu est sacré, le feu ne s'y serait jamais éteint depuis des milliers d'années. C'est un privilège d'être inhummé ici pour un indien. Il faut faire attention, pas de photo sous peine de se voir affliger des amendes par des locaux armés de bâtons. Il ne faut pas les écouter non plus car ils te font te déplacer pour ne pas générer un mauvais karma, respect des familles, etc, et après du point de vue où ils t'ont emmené essayent de te soutirer de l'argent pour les mêmes raisons, karma, blablabla. Nous ne nous laissons pas avoir et bougeons plusieurs fois. La première impression c'est l'odeur de chair brûlée qui vous glace les os. Ensuite le déroulement, les hommes décédés sont enveloppés dans un linceul blanc, pour les femmes c'est rouge. Le corps est ammené sur les bords du Gange sur un brancard de bambou près d'un brasier éteint et recouvert de fleurs très colorées. Ensuite on le recouvre de 300 kilos de bois quand on a les moyens. Si l'on peut se le permettre du bois de sental à 50€ le kilos, ou pour moins cher du bois qui brûle mal à 50 centimes. Si l'argent n'est pas suffisant, moins de bois et le corps à moitié brûlé finit dans le Gange comme ça. Le fils ou à defaut l'homme le plus proche du défunt allume le feu avant de s'être fait rasé la tête ne laissant qu'une petite mèche de cheveux derrière le crâne. Parlant de crâne c'est aussi à cet homme de fendre celui du défunt à la hache pour en laissé s'échapper l'âme. Quand le feu s'éteint, on vérifie que tout a bien brûlé en tapant sur les cendres avec un bâton brisant les derniers gros os puis le tout part dans les eaux sacrées. De petites mains s'en vont rechercher les éventuels bijoux ou dents en or portés par le defunt. Faisant mine de téléphoner Yoann arrache quelques images avec l'iPhone...
 
Que de sensations fortes depuis notre arrivée ici... Nous reprenons notre ballade déconcertés, pleins d'images et d'odeurs qui s'incrustent dans le crâne. Cela nous emmènent à presque nous perdre dans les ruelles de la ville. Puis l'estomac crie famine, il est 16h. Autant dire que nous avons trouver meilleur coupe faim que toutes les pilules existantes. Nous nous installons dans un boui-boui et trouvons un plateau que l'on partage rempli de tout plein de spécialités locales: olives, bouillie d'épinard fortement épicée, pommes de terre, différentes lentilles, du riz et 2,3 sauces pour aller avec. Ayant peur de manquer nous rajoutons un pankraht au fromage, et du thé.
Nous passons près du temple d'or qui en est recouvert de 800 kg, mais ne pouvons le visiter, réservé aux locaux encadrés pas les militaires et nous ne pouvons en voir un centimètre carré car il est encastré au milieu du dédale de ruelles. Déçus...
Nous retournons dans le brouhaha du shawk, la rue commerçante où sont concentrées sur 300 m des dizaines d'échoppes vendant toutes sortes d'artisanat et de vêtements. A l'auberge, la musique adoucit les moeurs dit-on, Laure joue du melodica et cela nous repose mentalement de toutes ces émotions. Nous ressortons boire un thé, et voulant prendre un billet de train pour un jour où il n'y en pas, il va falloir revoir les plans.

 
Vue de la guesthouse
Nous n'avons pas (encore) la galle mais lui si...
Au bord du Gange, on joue aussi au cricket
Tandis que les vaches sacrées se prélassent
Les crémations
La queue pour entrer au temple
 

2 commentaires:

  1. cela me rappelle "La cité de la joie" de Dominique Lapierre un super bouquin sur l'Inde et un très beau film bouleversant et remuant les tripes comme vos récits...baci mamma

    RépondreSupprimer
  2. dès votre arrivée aux Indes moi aussi je traverse 'la citée de la joie" mais savoir que vous "toucher du doigt"et que cette vie m'interpelle d'avantage
    De plus pour ma fin de vie j'ai prévu l'incinération mais je vais me pencher sérieusement sur les clauses du contrat -à savoir éviter les coups de bâtons pour constater la mort et prévoir un bon cercueil etc etc
    ceci dit vous avez du mérite pour traverser cette pauvreté et le coeur bien accroché
    bonne continuation annie la petite famille martinez

    RépondreSupprimer